A VAUX L’EAU…
(ou quand tout va de travers)
Je ne saurai écrire en poésie tout ce qui s’est passé depuis quelques jours. Et ce que j’ai entendu
ce matin est à ce point édifiant que je vous l’explique de façon un peu inhabituelle.
Entrée ici en vue de permettre de visualiser mes crises, tant sur vidéo, que sur tracé
d’électro-encéphalogramme, et ayant déclaré trois crises consécutives à mon arrivée, il me semblait que les conditions étaient réunies pour que les spécialistes disposent de toutes les données
nécessaires pour ce bilan neurologique.
Ce matin, une doctoresse vient me dire : « je diminue votre traitement, restez au lit car
vous risquez de déclarer une crise et nous voudrions l’enregistrer sur vidéo ».
Quid ?
- Poussant la
discussion plus loin, j’apprends qu’avant mon arrivée les médecins savaient que la caméra dysfonctionnait. Aucune des trois crises n’a donc été filmée !
- Or, on m’a fait
changer de chambre quatre jours après mon entrée seulement pour me placer face à une caméra en bon état de fonctionnement.
Ce que je ne vous ai pas expliqué c’est que la crise qui m’a valu une chute, s’est déroulée alors
que l’on avait oublié de me placer les protections latérales sur le lit. Et quand j’ai appelé pour signaler ma crise, c’est une stagiaire et non une infirmière qui est venue. Laquelle n’a,
manifestement, pas su gérer cette crise et j’ai chuté (non pas au sol) mais en me cognant l’œil sur l’angle de la table près de mon lit.
Il suffit de voir l’état de mon œil pour le comprendre. Et cela, le médecin à qui j’en ai parlé ce
matin a eu peine à l’infirmer. J'ai d'ailleurs, maintenant, un hématome sur le bras, correspondant à la hauteur de ladite table. J'en conclus (et je ne suis pas seule) que la stagiaire a d'abord
cherché à bouger la table au lieu de me soutenir pour que je ne tombe pas. J'ai probablement basculé au moment de ma perte de connaissance et si j'ai saigné au niveau de l'oeil ce n'est pas le
sol qui a pu provoquer cela.
Lorsque je demande à ce docteur si lors de leurs réunions permettant de faire le point sur les
dossiers des patients (nous sommes deux en surveillance constante) il n’est pas possible d’éclaircir ce type d’incident, on me répond : « je n’ai pas le temps de réunir mon staff »
SIC.(*)
Au regard de tout ce que j’ai constaté ici depuis mon arrivée (j’ai pourtant tenté de rester
positive), j’indique à ce médecin que j’établirai un rapport sur les dysfonctionnements graves de cet hôpital.
Réponse : « Si cela peut enfin faire bouger notre direction, faites-le » !! Et
d’ajouter : « Mais vous savez c’est la crise en Europe » (Ah ? Je ne le savais pas…) « Nous manquons de matériel qui fonctionne et les infirmières ne peuvent pas être
face à l’écran tout le temps pour vous surveiller »… « Vous êtes autonome, vous pouvez vous débrouiller seule et poser les protections vous-même »… Et bien voyons ! (Je ne
savais même pas où elles étaient, ce sont des protections amovibles qui étaient pliées dans un endroit de la chambre et qui ressemblent en fait à des petits matelas). De plus, j'avais
remarqué après l'incident qu'une affiche dans ma chambre signalait que les infirmières avaient le devoir de poser ces protections par souci de prévention... Ces consignes ne figurent pas dans la
chambre dans laquelle je suis maintenant (elles sont sur la porte, à l'extérieur).
Etant donné que l'on se base autant sur l'autonomie d'un patient, comment font les épileptiques qui
n’ont aucune autonomie, même pas de langage et qui ne savent pas raisonner ? (cas de la personne qui est en surveillance dans l’autre chambre).
Dans le cabinet de toilettes dont je dispose, il y a une barre en forme de rectangle à hauteur du
robinet (pour les personnes à mobilité réduite). Il est inévitable que l'on se cogne la tête dessus en se lavant les dents. Cela m'est arrivé une fois. Je fais attention, mais il est difficile
d'échapper à ce choc. Je l'ai signalé et on m'a dit "notifiez-le sur votre fiche de satisfaction, cela va nous aider à améliorer le confort des chambres". Je comprends aisément que tout ne
puisse être équipé en fonction de la situation de chacun, mais cela reste dangereux.
Je vous passe tous les autres détails et toutes les aberrations que j’ai pu entendre et voir ici,
dont beaucoup sont liés au manque de concertation et à la désorganisation du service. C'est vraiment désolant et cela ne fait que confirmer tous les reportages télévisés ou autres concernant les
soins hospitaliers et le manque de suivi de la part des médecins.
Ma déception est grande, je ne vous le cache pas. Je n’imaginais pas que cet hôpital ait pu perdre
autant de sa qualité en matière de soins et de suivi médical. Surtout dans un centre que l’on appelle « centre de référence pour l’épilepsie réfractaire ».
Inutile, donc, de vous dire que je suis contente de quitter ce lieu vendredi matin. Et en dehors de
mon rendez-vous du 8 juin avec l’épileptologue, je ne suis pas près de remettre les pieds ici, ni même de m’y faire opérer si les conclusions allaient dans ce sens.
Oui, tout part à vaux l’eau… Et je plains sincèrement le personnel de cet hôpital (avec lequel j’ai
beaucoup discuté et notamment l'infirmier dont je salue le dévouement et la patience), car quand j’entends qu’une infirmière doit être à la fois en neurologie, en néphrologie et dans un autre
service encore, je me demande vraiment comment il peut y avoir un suivi normal des patients. Les bénévoles sont donc d'une aide très précieuse, comme je l'écrivais hier. Cela n'enlève rien à la
qualité et à la bonne volonté du personnel hospitalier qui fait ce qu'il peut dans les conditions que je vous narre ici.
Désolée de vous établir un constat comme celui-ci. Mais je préférais vous écrire cela plutôt que de
le développer dans chacun des commentaires qui m’a été adressé.
Considérez donc, exceptionnellement, cet article, comme une réponse « générale » à tous
vos messages de soutien.
Je vous remercie une fois encore pour votre fidélité et pour votre amitié. Je vous assure de la
mienne également.
Je vais essayer de me reposer un peu car les tests psychologiques d’hier ont duré plus de deux
heures et cette matinée-ci fut particulièrement éprouvante et contrariante.
Ceci étant, l'écrire est, comme toujours, un bon exutoire et me
soulage.
Bonne journée et bon week-end à toutes et à tous.
Je ne serai probablement pas présente sur le net avant quelques jours. J'espère que vous le
comprendrez.
Je vous embrasse,
Cathy.
(*) J'ai appris tout à l'heure par l'infirmier
avec lequel j'ai discuté de tout cela, que les réunions visant à faire le point sur la situation des patients ont lieu, mais en l'absence des médecins qui exercent dans deux hôpitaux à
la fois.
Cette discussion fut très intéressante et
enrichissante, tant sur le plan de mon suivi, que sur le plan organisationnel de l'hôpital.
Je redis ici tout mon soutien au personnel
infirmier qui travaille dans des conditions très difficiles, mais qui fait preuve de beaucoup de courage et de professionnalisme.